Les mots du bureau : « Tu me la fais quick and dirty. »Alexandre des Isnards - 30 août 2019

En français, « vite fait mal fait ». Mieux vaut le dire en anglais. Voici pourquoi.

Ce jargon courant dans l’informatique est devenu un leitmotiv des entreprises. Surtout dans les startup. Aujourd’hui, il faut lancer le produit, l’appli ou le prototype sans attendre la perfection. Ça permet de récolter les feedbacks des usagers. Les équipes corrigent alors le tir et parviennent à quelque chose de clean. L’important c’est d’aller vite.

Quelques bullets points, une petite rustine pour débuguer l’appli, une maquette d’appoint. Quel que soit le contexte, l’expression désigne une solution temporaire, un bricolage qui fait le job. Quick and dirty, synonyme de torché sur un coin de table.

Un manager qui sent les choses

Pour un client, c’est un outil de négo redoutable. On fait semblant d’admettre que ce sera bâclé pour bénéficier d’une livraison rapide. Et ensuite, on récupère le travail avec des exigences de qualité. Pour garder son client, le prestataire acceptera le prix d’un travail vite fait mal fait…Et fera tout pour que ce soit bien fait, quitte à y passer la nuit. Quick and dirty, qui ne doit finalement jamais être dirty… C’est aussi un moyen de présenter son projet sans s’impliquer. Une fausse modestie préventive. «  C’est  du quick  and dirty. » sous-entendu, ce n’est qu’un première jet. L’expression décomplexe.

Aujourd’hui le travail prend les atours du spontané vite fait bien fait. Surtout ne pas donner l’impression que c’est trop travaillé. Les quick and dirty incarnent des solutions malignes, rapides, mais masquent la réalité du travail fourni. Mieux vaut fait que parfait. Quick and dirty, version 2.0 du « mieux est l’ennemi du bien ». 

Chronique parue dans Management, numéro 249, janvier 2017